Les règles qui encadrent la communication dans les moteurs de recherche
L’utilisation de termes de marques dans les annonces sur les moteurs de recherche est une pratique courante. Le souci est qu’il n’est pas rare qu’ils soient employés à tort et à travers sans que ses propriétaires aient été informés ou aient donné leur accord.
Les moteurs de recherche, Google notamment, étant hautement convoités par des annonceurs de tous bords, comment s’assurer que sa marque ne sera pas utilisée par un tiers non autorisé ? Quelles règles régulent l’achat et l’emploi de mots-clés dans le search ? Que prévoit le droit en cas de conflit ?
Droit et jurisprudence
Les marques enregistrées sont protégées par la propriété intellectuelle. Seuls les annonceurs autorisés par le propriétaire de la marque peuvent s’en servir, y compris à de fins de communication et promotion digitales.
Un arrêt de la cour de cassation datant de 2015, concernant un litige entre la SNCF et le site lo.st pour pratique commerciale trompeuse sur les moteurs de recherche, illustre bien une jurisprudence existant depuis 2010. Il détermine que l’on peut acheter une marque en tant que mot-clé à condition que cela ne nuise ni à la marque ni à ses fonctions.
« Cela signifie que l’on peut communiquer sur une marque si on a une raison ‘valable’ d’en parler : un revendeur officiel a tout intérêt à communiquer sur le fait qu’il vend un produit de cette marque », explique Caroline Juillet, juriste et account manager chez Monibrand. « L’usage du mot de la marque ne doit en aucun cas créer de confusion dans l’esprit de l’internaute sur le produit, son origine et son propriétaire », ajoute-t-elle.
Google autorise les revendeurs d’une marque, en plus de ses propriétaires, à se servir des termes de marque dans leur SEA. Le moteur de recherche impose des restrictions à cet usage : ne pas servir à des fins concurrentielles, ne pas induire l’internaute en erreur et renvoyer impérativement vers une offre en parfait lien avec l’annonce.
Les moteurs de recherche ne contrôlent rien car ils ne sont pas responsables
Si les règles de Google semblent très respectueuses de la jurisprudence et du droit de la propriété intellectuelle, la pratique est toute autre. « Comme aucun moyen de contrôle n’est prévu par le moteur de recherche, en pratique n’importe qui peut communiquer en achetant une marque en tant que mot-clé », précise Caroline Juillet.
Cette situation est encore plus aggravée par le fait que même les annonceurs utilisant des mots génériques peuvent voir leur annonce reliée de manière automatique à une requête comportant un terme de marque. En cause, l’algorithme de Google, qui opère ces rapprochements de manière automatique et sans que personne n’en connaisse les critères. « On voit bien que l’algorithme de Google a un rôle actif, alors qu’il est censé être totalement passif, du fait d’être un hébergeur », déplore Caroline Juillet.
Les moteurs de recherche n’exercent pas de contrôle et ne sont pas non plus tenus responsables en cas de litige en effet. Cela est un fait reconnu depuis l’adoption de la directive européenne sur le commerce électronique en juin 2000, transposée en droit français en 2004 par la loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN). Cette loi allège considérablement la responsabilité des hébergeurs à l’égard des contenus qui sont véhiculés par les utilisateurs de leurs services.
« Depuis 2010 une jurisprudence s’est formée dans cette même direction : étant considéré comme un hébergeur, Google ne doit pas être tenu responsable de ce qui est pratiqué en matière de publicité sur son moteur de recherche », explique Caroline Juillet. En d’autres mots, en cas de conflit sur l’utilisation d’un terme de marque, ne pouvant pas poursuivre Google, la marque se voit obligée d’attaquer en justice chaque annonceur non autorisé ou malveillant, une lourde et coûteuse tâche, vu le nombre d’annonces indésirables publiées partout sur la toile chaque jour.
Au final, comment se protéger ?
Dans un tel contexte, la meilleure manière de se protéger est de surveiller l’usage qui est fait de sa marque – des outils existent pour cela – et de contacter directement les annonceurs indésirables pour les convaincre de changer leur pratique.
« L’annonceur ayant le rôle actif et pouvant être poursuit avec une jurisprudence de plus en plus claire sur sa responsabilité, c’est dans son intérêt d’éviter de longs procès et des condamnations », explique la juriste de Monibrand, en précisant que très souvent il s’agit de personnes de bonne foi ayant employé des mots clés génériques au départ. « On leur demande de mettre en place des listes d’exclusion de termes de marque », ajoute-t-elle. Dans l’écrasante majorité des cas, ces médiations aboutissent à des gentlemen’s agreements et à la mise en place de codes de bonne conduite.
Il va de soi cependant que si on constate une atteinte à sa marque, comme une contrefaçon ou une pratique commerciale trompeuse, la solution est d’aller en justice.